Guy Ferrer, « Alter Ego » – Lima, Pérou, 2007 – Huile sur toile – H130 × L160 cm
Tolérance n. f. (latin tolerare, supporter). Respect de la liberté d’autrui, de ses manières de penser, d’agir, de ses opinions politiques et religieuses. Larousse, 2000.
La tolérance d’un individu ou d’une société s’évalue en fonction de ses réactions de rejet ou d’empathie face à l’Autre, l’Autre toujours porteur d’une différence, plus ou moins respectée à l’aune du jugement individuel ou collectif. Alors que la diversité est la plus belle source de renouvellement de notre humanité et sa garantie de service biologique et spirituelle, elle peut déranger par la remise en question de valeurs considérées par certains comme étant celles de la vérité unique.
Aborder la question de la TOLÉRANCE, c’est donc entrer au cœur même du dispositif appelé « nature humaine », espace où se complètent et s’opposent des sentiments paradoxaux enchevêtrés, tels que la générosité face à l’égoïsme, l’obéissance face au goût du pouvoir, le désir de plaire face à la peur de décevoir, etc. La complexité de la psyché ne se contente évidemment pas de ces simples dualités en noir et blanc, mais décline tous, les demi-tons de gris possibles grâce auxquels naît la personnalité individualisante. Ainsi chacun doit affiner, de façon plus ou moins consciente, son adhésion, ses remises en question ou ses refus des valeurs que la société nous propose.
Il nous paraît intéressant de remarquer ici qu’il existe de nombreuses intolérances, religieuses, sexuelles, raciales, sociales…, alors qu’il existe une seule tolérance, qu’on pourrait résumer en fait à son plus beau synonyme : l’imagination.
Accepter la différence de l’Autre sans vouloir nécessairement le juger et le corriger en fonction de ses propres certitudes, réfléchir un peu avant d’accrocher l’étiquette « défaut » que l’on aurait tendance à coller un peu vite sur ce qui nous déplaît, voilà qui détermine effectivement une position tolérante, valeur plurielle compilant bienveillance, respect de l’Autre, envie de comprendre, désir d’ouverture à d’autres vérités, etc.
Agir avec tolérance, c’est donc relativiser ses propres valeurs, tout en acceptant ce faisant le risque d’ébranler ses plus solides certitudes. C’est faire un voyage en des contrées inconnues pour y découvrir que d’autres y vivent en harmonie suivant une charte de valeurs sociales, morales, religieuses différentes des nôtres.
Parmi les grandes valeurs que l’humanité a inventées, nous dirons que la tolérance est cardinale dans le sens qu’elle propose au premier plan une clé d’harmonie dans le cœur de l’homme et, au second plan, d’harmonie dans le monde.
Vue en ce sens, la tolérance ne serait rien moins que la condition de la paix, tant individuelle que collective, nous dirons même de la paix collective parce qu’individuelle.
Il existe, comme vous le savez, de nombreuses raisons de montrer l’autre du doigt et ainsi de l’accabler pour sa pseudo «a-normalité ». Car c’est bien là en effet que se cache le nœud du problème, le terreau fertilisateur de l’in-tolérance : la dérive supposée de la « normalité » !
Donc, la question fondamentale qui se pose ici est « qu’est-ce qu’être « normal » ?!
Notre société normative héritée des valeurs gréco-romaines a érigé des modèles idéalisés, posant les bases standardisés de la famille et des rapports sociaux fondamentaux. Nous ne développons pas ces sujets brûlants d’actualité, mais il se trouve qu’aujourd’hui certaines de ces valeurs sont profondément remise en question par la marche du monde, d’autres voies s’ouvrant en alternative à celles qui semblaient acquises pour l’éternité, dont le modèle familial traditionnel. Nous assistons donc en pratique à un test « grandeur nature » que la tolérance doit passer, de gré ou de force, en France comme ailleurs.
Être homosexuel. Être enfant sans père ou sans mère, demain peut-être avec deux pères ou deux mères. Être étranger ou d’une communauté minoritaire. Être atteint d’une déficience physique. Être vieux…Nombreuses sont les pseudo bonnes raisons de laisser un individu sur la touche dès lors qu’il ou elle appartient à une part minoritaire en nombre de la société. La profession d’artiste n’est-elle pas suspectée, a-normale aux yeux de beaucoup ?
Aujourd’hui plus que jamais, dans un monde qui s’est radicalisé, en particulier sur le sujet des religions, la tolérance n’est pas une posture intellectuelle mais vraiment une condition fondamentale du vivre-ensemble. Elle s’est heurtée et se heurtera toujours à ses principaux ennemis, l’égoïsme et la suffisance. Mais elle seule peut faire taire le racisme et l’ostracisme, elle seule peut encourager dialogue et ouverture bienveillante, complémentarité pacifique et respect des différences. L’histoire regorge d’exemples où le refus de l’autre a conduit au chaos. Les guerres de religions et la Shoah ont prouvé quels ravages auto suicidaires l’humanité peut s’infliger lorsqu’elle s’aveugle dans la voie de l’intolérance.
Le pansement de bon nombre de ces malheurs tient en un état d’esprit que traduit un mot, un mot de neuf lettres que nous pourrions appliquer tel un onguent sur les plaies du monde, un mot qu’il ne faut surtout pas confondre avec « condescendance » : ce mot, c’est « TOLÉRANCE ».
Nous le savons, le but dans la vie n’est pas de tous se ressembler (quel appauvrissement cela serait !), mais bien au contraire de reconnaître en l’autre des valeurs que nous n’avons pas et qui nous enrichissent, nous revitalisent, comme autant de sources auxquelles s’abreuver.
Le monde est beau grâce à cette mosaïque de possibles, grâce à cette variation infinie de nuances lui donnant tout son intérêt. La tolérance est une culture, une philosophie, nous dirons presque une idéologie. Elle n’est pas passive, ce que serait le laxisme, son dangereux voisin sémantique, mais active et progressiste. C’est selon nous un vecteur puissant pour la qualité d’une société républicaine et démocratique puisque, plus que les groupes communautaires, elle fait belle place à l’individu, avec la considération et le respect qui reviennent à chacun d’entre nous.
Tolerance n.f ( latin tolerare, support). Respect for the freedom of others, of its ways to think, to act, to his political and religious views. Larousse, 2000.
The tolerance of an individual or a society is based on his reactions or rejection or empathy in front of the other, the other always bearer of a difference , more or less accepted on the basis of individual and collective judgment. While diversity is the finest source of renewal of our humanity and his biological and spiritual survival guarantee, it can disturb by the questioning of values considered by some of being those of the single truth.
Tackling the subject of tolerance is therefore entering the heart of the so called “ human nature”, where contradictory and entangled feelings are opposed and complement each other. For example, generosity versus selfishness, obedience versus the state of power, the desire to please versus the fear to disappoint and so on… The complexity of the psyche is obviously not only these simple dualities in black and white but also declines all the possible grey semitones through which comes out the individualizing personality.
So everyone should refine more or less consciously, their refusal of the values that a society offers . It seems interesting to note that there are many intolerances, religious, sexual, racial, social…., while there is a single tolerance, that could be summed up in its most beautiful synonym: imagination . Accepting others’ differences without judging or correcting according to one’s own certainties, think twice before slapping the label of “odd one” too quickly on something or someone we dislike, that is true tolerance which brings together benevolence, respect for others, desire for openness to other truths.
Acting with tolerance puts into perspective and revitalizes one’s own values, while accepting thereby the risk of undermining one’s most solid certainties. It means travelling to unknown lands to discover that other people live in harmony by following social, moral, religious values different of ours.
Among the major values that humanity has invented, we will say that tolerance is essential in so far as it offers a key to harmony in the heart of Man in the first place, in the world in the second place. In other words, tolerance is nothing less than the condition of peace, both individual and collective, the latest resulting from the first .
As you know, there are many reasons to blame people and to oppress them because of their difference : indeed, this is the heart of the debate, the fertilizing soil of intolerance. The main question is What is normal ?
Our normative society inherited from the Greco Roman values erected idealized models setting up the basis of family and fundamental social relations. We will not develop these passionate topics. Nevertheless, some of these values are deeply challenged by the world other routes opening as an alternative to those who appeared to be everlasting, including the model of the traditional family. We are witnessing a “life size” where tolerance has to overcome, in France and elsewhere. Being homosexual, being an orphan, having two fathers or two mothers, being a foreigner, belonging to a minority, being disabled, being old or just different : inferior or superior. There are many pseudo good reasons to leave someone out just because they belong to a minority. Being an artist is considered a-normal in the eyes of many, isn’t it ?
Today more than ever, in a radicalized world especially where religion is concerned, tolerance is not an intellectual posturebut a fundamental condition for a living together. Tolerance will always fight its principal enemies : selfishness and sufficiency, defeat racism and ostracism, encourage dialogue and open – mindedness, respect differences. History has shown what chaos intolerance can bring about. The wars of religion and the holocaust prove the ravages of blind intolerance. The healing for all these misfortunes can be found in one word : tolerance. An ointment on the wounds of the world.
We all know that our purpose in life is not to all look alike ( what impoverishment that would be ! ) but on the contrary, recognize the talents and values of others that we do not have and which both revitalize and enrich. It’s a beautiful world with mosaics of possibles, a huge variety of shades which make it so exciting ! Tolerance is a culture, a philosophy, we almost say an ideology. It is not passive, that would be laxism ( its dangerous semantic neighbour) but active and progressive.
In our opinion, it is a powerful vector for the quality of a republican and democratic society. It welcomes the individual, with the consideration and respect due to all of us.